Brouillons

La psychette : Houlà, ça va pas .

Demoral : Moi si, le reste non.

La psychette : Raconte moi.

Demoral : Quoi?

La psychette : Une histoire.

Demoral : Moitessier, vous en êtes vous?

La psychette : Qui?

Demoral : Laissez tomber, je signerai quand même le chèque.

Alors que Moitessier, un marin, se désintéresse de la course de ses prix et de ses enjeux, un anglais Robin Knock-Johnson emporte amour gloire et beauté. Seulement, dans mes recherches, je découvre rapidement qu’il fut déclaré désespérément normal par les psychiatres de la course. J’ai vécu au moins vingt ans avec cette idée fausse dans la tête que le vainqueur était un autre de l’autre rive. Puis l’administration française m’a exclu et la marine britannique m’a accueilli. J’ai voulu en savoir plus sur ce gentleman sailor trop parfait. Dans une vidéo, il explique hilare comment, après avoir vidé ce qu’il lui restait d’alcool fort un matin coque retournée au large du cap horn, persuader des médecins des journalistes, en un mot des terriens, de le faire passer pour un mec censé. Que quand t’es dedans, c’est trop tard pour avoir peur.

La psychette : Pourquoi tu me racontes ça?

Demoral : Vous êtes gracieusement rétribuée par ma mutuelle pour répondre à cette question.

La psychette : Ne sois pas désagréable.

Demoral : Quand et où ai je le droit, depuis que je ne l’ai plus pour ma joie , d’exprimer ma colère mes doutes mes peurs depuis que le rêve est devenu ridicule. .

La psychette : Ici, vas y, lâche toi.

Bien. Je pense comprendre que mon avenir aussi bien au sein du XV de France, que de l’élite de la finance ni de l’intelligentzia à la mode est compromis. Cependant, ne rencontrant et n’aimant que des fous, je me demande s’il ne serait pas temps d’enfermer celles qui me disent  » vous avez la cloison nasale déformée » alors qu’à la base, ça fait six mois qu’ils me font hyppomaniaquer sur un problème d’hypophyse. Ceci dit , selon la médecine légale, j’ai un très beau cervelet. Vous voulez voir, c’est comme un clito mais en plus beau?

La psychette : La tendance à la surexposition glandulaire est typique des névrotiques. C’est très bien mon petit marinou. Tu fais le deuil de celles que tu avais dans le caleçon et tu affiches à la donzelle de passage tes prédispositions à la séduction qui, manque de sexe, ne peuvent se terminer que par un affrontement. Tu est déçu et tel le bourdon sur une vitre trop transparente tu recommences le lendemain.

Demoral : J’ai envie de faire pipi.

La psychette : Tu voudrais pas essayer une autre thérapeuthe?

Demoral : Je me suis assis,, je me suis lavé les mains et je n’aime que vous.

La psychette : Tu es domptable. Agenda. Quatrième jeudi du mois.

En cas d’insomnie :

Plaisantons

La psychette : Le marinou ! Mais qu’il est beau !!!

Demoral : Oui nan mais non, faut vraiment que vous arrêtiez avec ça.

La psychette : Ha, je vois, une question te chiffonne.

Demoral : S’il n’y en avait qu’une.

La psychette : Tente d’exprimer la première qui te passe par la tête.

Demoral :  » … « 

La psychette ; Non Demoral !

Demoral : Mé euh.

La psychette : La deuxième , vite.

Tout au long de mes études, la professeur de mathématiques exprimait au moins une fois par an, dans un français parfait, un problème absurde sans solution. Elle déclenchait le rire dans la classe en concluant par la question :

« Quel est l’âge du capitaine? »

Cette plaisanterie ne m’a jamais vraiment plu et n’excite encore aujourd’hui qu’une proportion modérée de mes zygomatiques alors vous pensez bien que de savoir si; à mi-vie, je serai un jour « un Homme mon fils » ne me taraude qu’à peine l’esprit.

La psychette : Tu dors en ce moment?

Demoral ; Je rêve de démontrer mon idée première.

La psychette : Qui t’en empêche?

Demoral : L’exposé est moins verbal, plus sujet à toucher dans le subtil.

La psychette : Et la mer?

Demoral : Quoi ma mère?

La psychette : Ne te fais pas plus idiot que tu ne le paraît.

Demoral : Je fais payer mes récits maintenant.

La psychette : Combien?

Demoral : j’ai pris des gifles pour moins que ça.

La psychette : Tu ne l’aime plus?

Demoral : Qui?

La psychette : La mer.

Demoral : Autant qu’une Ex.

Je sens que tu fatigue là.

Plutôt.

La psychette : Allez encore un effort, tu me décris ton souci sans sucre et je te libère.

Bien, je reprends. Au carrefour d’en bas de chez moi deux commerces se font face. L’un, subventionné par l’état, propose une mort longue lente et insipide, l’autre une vie courte mais intense.

La psychette : Et toi, tu veux quoi?

Je prépare le braquage d’un trésor dont personne ne veux En un lieu dont elles m’ont confié la clé.

La psychette : « … »

Demoral : « ;..) »

La psychette : Ton agenda. Le vingt huit ça te va?

La culture est inattaquable.

Matricidons.

Tout est prêt.

Elle va arriver.

J’ai changé toute la déco.

Sans aller jusqu’à repeindre les murs,

j’ai tout réorganisé la bibliothèque,

mis en valeur mes dernières aquarelles

et préparé une playlist qui va la transporter.

La psychette : Bonjour mon petit marinou

Demoral : Bienvenue dans mon monde.

La psychette : Dis donc, ton niveau de ménage a baissé.

Demoral : Allez vous faire foutre !!!

La psychette : Tu vois, ta colère, il faut savoir d’où elle vient.

Demoral : Vous voulez que je vous raconte le jour où j’ai failli tuer ma mère ?

La psychette : Plaît-il ?

Demoral : Ben j’ai pas fait exprès mais c’est passé à deux gorgées de réussir.

La psychette : Ho mon Dieu, qu’as-tu fait là ?!?

Demoral : Papa avait détourné un yacht et , pour une fois, y avait convié sa femme plutôt qu’une brokeuse quelconque. Sur un coup de radio, comme j’étais dans l’coin, nous nous étions donné rendez-vous au Capo Rosso. La journée était idyllique quand j’ai un peu déconné. J’ai confié, à une picarde, un masque et un tuba sans préciser par quel côté respirer. Elle est allé voir cinq minutes ce qu’il se passait de l’autre côté

La psychette   Mon Dieu mais quelle famille ! Et comment vivez vous ce genre de souvenirs traumatiques ?

Demoral : Jusque là très bien. C’est môman qui m’en a reparlé la semaine dernière. Sinon j’avais totalement oublié l’incident.

La psychette : Tu verras, tu feras moins le malin quand elle sera partie.

Demoral : Ca m’étonnerait. Selon toutes vraisemblances, et compte tenu de mon train de vie, il est peu probable que je lui survive.

La psychette : Je ne suis pas convaincue du bien fondé de ces séances à domicile. Ca ne vous inquiète pas ce genre de propos ?

Demoral : Vous perdre, vous, me terrifierait.

Accostons.

La psychette : Mon p’tit marino, comment vas tu ?

Demoral : Si au moins vous me vouvoyiez, ça nous ferait une rime.

La psychette : Je ne comprends rien

Demoral : je recommence :

La psychette :         Mon p’tit marinou, comment vas-tu ?

Demoral :                 Si au moins vous me vouvoyiez, ça nous ferait une rime.

La psychette :         Bien. La séance dernière fût un peu dure, racontez moi un   souvenir plus léger.

Demoral :                 Comme la fois où je me suis tapé la fille du Boss ?

La psychette :         Toujours les extrêmes, non juste un moment heureux.

Demoral :                 Vous avez raison. De toute façon ce n’était pas sa fille. Mais elle en avait l’âge. Et n’avait semble-t-il rien contre l’inceste.

La psychette :          Demoral !!!

Demoral :                 L’amarrage à Ponza. Vous vous souvenez ? La délégation de diplomates franco-suédoises ?

Nous nous étions fait défoncer le bastingage la nuit précédente au quai des millionnaires. Pour réparer, nous logeons désormais aux chantiers. De l’autre côté du port. C’est tellement moins glamour mais tellement plus charmant. Pour la manœuvre, pas d’assistance. Pendant que le capitaine manœuvre, je saute sur le quai, je noue de chaise, je remonte à bord en prenant appui sur le hublot de la cuisine et en m’aidant de ce qu’il reste de tubulure inox. Je recommence à l’arrière en grimpant, cette fois, sur les échappements. Les moteurs se taisent, tout s’arrête. Une assemblée d’académiciennes m’observe l’air béat. Bordel, faut faire les vitres.

La psychette :         Je croyais que c’était vous le capitaine ?

Demoral :                 J’ai seize ans là, vous ne comprendrez jamais donc rien ?  

Le lendemain, le capitaine m’a offert une montre.