Centuri

C’est le dernier jour du charter. « Lady Brigitte II » remonte à 10kts le Cap Corse côté est après avoir passé dix jours dans les îles entre Elbe et Giglio. J’aime ce coin, il n’y a jamais de vent et il est oublié de la plus part de mes confrères.

Tout s’est bien passé. Les invités forment une jolie bande de copains qui profitent simplement de leurs vacances entre baignade, farniente et apéros rosés. Il n’y a rien à raconter, à part une marée noire, il ne peut plus rien m’arriver.

Si quand même. Un matin de très bonne heure j’avais mouillé sur Gianuttri une petite île en forme de fer à cheval abritée de tous les vents. La crique était déserte, j’avais posé l’ancre au plus prêt des rochers et frappé une amarre à terre pour éviter l’évitement.

L’ Italien est très navigateur ou inconscient. Il s’aventure au large avec n’importe quelle barcasse si bien que je me suis vite retrouvé entouré d’une myriade petits bateaux. Quand les carabinieri sont arrivés, avaient ils peur que je déplace l’île, ils m’ont demandé de retirer mon amarre à terre . J’ai fait un strike dans la crique.

Je prends quand même la météo. De l’autre côté du cap ça peut bastonner sévère. D’aussi loin que voit le Cross med, on ne m’annonce, avec un accent Corse invitant à la sièste, que du force 1 à 2 avec calmes locaux. Le pied.

Je peux donc faire escale pour la journée devant Centuri mon endroit préféré de Corse. Le bateau est immobile sur une piscine d’eaux turquoises. Je peux l’abandonner le temps de faire visiter ce petit port de pêche à mes clients. Ils font provision de langoustes sans oublier l’équipage et prennent l’apéro sans oublier le capitaine.

Toujours rien à dire jusqu’à ce que la patronne débarque d’un air penaud dans le poste de pilotage. « je suis désolée, nous avons fait tomber une serviette de bain dans l’eau ». Mon sang ne fait qu’un tour je vais intervenir.

Lorsque j’arrive à l’arrière du bateau, j’ai l’impression d’être un maître d’école devant sa classe qui vient de faire une bêtise. Je regarde, la serviette est bien là par quatre mètres de fond sur lit de sable blanc. Je lance un regard réprobateur à mon assistance et je me laisse tomber tout habillé par dessus bord.

C’est en nageant vers le fond que je me dis que j’aurais peut être dû écouter les réprobations de mon équipage lorsqu’ils m’ont vu préméditer mon coup en retirant portable et portefeuille de mes poches. J’aurais passé l’age de ce genre de conneries et ce ne serait pas digne de mon statut de capitaine.

C’est pourtant bien un accueil de rock star qui m’attend à mon retour sur la plage de bain du bateau. Ils sont morts de rire, m’applaudissent, me disent qu’ils n’ont jamais vu ça. Ce sont eux qui s’occupent de ma douche et de m’apporter une serviette sèche.

Pour le reste de la journée, qui est dors et déjà gagnée, je décide d’emmener à terre, un par un mon équipe pour une petite Piétra au soleil en terrasse. Ils l’ont bien mérité. Seulement, une bière par membre d’équipage, ça fait un équipage de bière pour moi et ils sont six. Lorsque je reviens sur le bateau, je suis dans le même état que mes passagers.

Il est temps de remonter l’annexe et de lever l’ancre pour la traversée de nuit vers La Napoule. Mer d’huile, pleine lune et chansons paillardes avec mes marins et mes invités.

Je vous propose un petit Red Cardell en fond musical.

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