Le calme est revenu sur Calvi. Quelques badauds flânent sur le quai d’honneur. « Lady Brigitte » est le plus gros et le plus beau bateau du port ce soir, j’en suis fier. Les clients sont sortis dîner comme chaque soir, après m’avoir laissé, comme chaque soir un pourboire indécent que je partage, sans m’oublier, avec l’équipage.
C’est l’anniversaire de l’hôtesse principale. Je me dois de marquer le coup. Elle est la première que je recrute professionnellement. D’habitude, lorsque je convie une postulante à un entretien, ça vire à l’apéro. Si elle s’intègre au groupe, elle est embauchée. Là, j’ai repéré une ligne très importante dans son cv. Elle a travaillé pour le groupe Rodriguez. Si je déteste cette société pour avoir industrialisé la plaisance, je dois reconnaître qu’en matière de service, elle est top.
Johana, mis à part de ne boire aucune goutte d’alcool ce dont je me méfie car les marins sobres trahissent, n’a qu’un seul défaut. Elle est maquée avec un capitaine Rodriguez et lui raconte tout ce qu’il se passe à bord. Il n’a d’ailleurs pas manqué de nous faire une petite visite en début de saison. Non tant qu’il s’intéressait au bateau mais plus pour jauger de la capacité du capitaine à prendre sa place entre les jambes de sa belle. Pôvre imbécile! sais tu que sans l’interdiction tacite que je me fais d’entretenir toute relation sexuelle avec l’équipage, ce que tu considères comme ta possession n’aurait eu aucune chance d’échapper à mon charme.
Je décide donc de laisser la seconde hôtesse en veille à bord pendant que j’emmène le reste de l’équipage boire un verre. Elle n’a que 18ans et c’est sa première expérience du yachtisme. Mais elle est la fille d’un ami marin pêcheur, elle se débrouille très bien, je lui laisse pour consigne de m’appeler au moindre souci et surtout si les clients rentrent plus tôt que d’habitude. Pour les autres, ce sera « au son des guitares » un bar très corse, délaissé des touristes, qui domine le port. Ce n’est pas qu’on est mal accueilli dans ce repaire à légionnaire, mais on sent qu’ici, il ne faut pas faire le malin. Ceci dit, notre uniforme nous attire la sympathie du personnel habillé de noir et très peu causant.
Je n’ai pas encore entamé ma première vodka/red bull de la première tournée, que le téléphone sonne. Ils sont là, le boss veut me voir.
C’est la catastrophe. Je viens de mettre en l’air tout le charter. Sur le chemin du retour, je tourne et retourne ce que je vais bien pouvoir répondre pour justifier un abandon de navire. Ma carrière est finie. Lorsque j’arrive au bateau, je les trouve tous attablés sur le pont arrière, ma tête est vide j’ai les jambes en coton. Le boss d’un grand geste lent m’indique un fauteuil libre.
« Captain (accent russe très fort) sit down »
ho putaing qu’est ce que je vais prendre.
« captain (silence ) today best holiday in my life »
ha bon?
« captain (silence) today best dive in my life »
c’est bon ça
« captain what we do tomorrow? »
Et nous voilà partis dans l’étude des cartes et des guides de plongée, mais je sais déjà ce que je veux faire demain.

Mais ? T’es un salopard de laisser la pôv’ petite jeunette toute seule pendant que vous allez faire la bringue 😱
Pétard, en plus d’avoir les chocottes, tu devais avoir les boules qu’ils rentrent plus tôt ! Ils vous ont un peu gâché votre délire là 😂😂😂
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Y a pas à dire, tu sais nous embarquer dans ton récit pittoresque 😎
P.S. : étrange comme « Chef Stewardess » me paraît sonner mieux que « Hôtesse principale », idem avec « on duty » traduit par « en veille » (= d’astreinte, de garde ?), parfois le Français manque de poésie… et l’Anglais me ramène 10 ans en arrière auprès de mon tendre First Officer and his Captain and the Flying Eagle’s Crew… Xxx memories memories Xxx
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